Ambitions et caractère innovant du projet

Ce projet est né pour répondre à deux lacunes actuelles :
1) le manque d’efficacité et de clarté dans les contenus des outils d’alerte en France (un signal sonore pour les sirènes du réseau SAIP, un message vocal / texte pour les automates d’appel d’alerte, un message texte pour les SMS géolocalisés et le CellBroadCast, etc.), alors qu’ils sont censés alerter et informer la population en cas de dangers ou de menaces susceptibles de porter atteinte à l’intégrité physique des biens ou des personnes
2) l’absence d’une réelle réactivité des populations, qui préfèrent poursuivre leurs activités (Lutoff et al., 2016)1 ou qui ne perçoivent pas les risques (Weiss et al., 2011)2, alors que l’alerte doit générer une réactivité (Lagadec, 2015)3 et induire des mesures réflexes de sauvegarde (Creton-Cazanave, 2010 4 ; Douvinet, 2018 5).

La plateforme utilisée comme support de départ sera mise à disposition par GEDICOM  (elle est utilisée en Belgique et à un niveau de maturité de 9) : c’est une solution globale servant à informer et à alerter des populations ciblées (mise en œuvre en Belgique). Elle est disponible en mode Software as a Service (SaaS), c’est-à-dire qu’elle permet de mettre en place le service immédiatement, d’adapter l’utilisation des services aux besoins, de sécuriser l’accès et de bénéficier des dernières mises à jour (logicielles et matérielles). Cette approche capitalise déjà divers modes de communication (SMS, messages vocaux, SMS géo-localisés, notifications push, e-mails, réseaux sociaux, etc.), définis selon chaque organisation. Depuis 2015, GEDICOM a émis plus de 8,5 millions d’appels, et gère près de 13 millions de contacts en France. Mais de nouvelles briques technologiques y seront combinées, pour assurer la diffusion sur les ondes radio, pour éviter la congestion des réseaux de télécommunication, et diffuser sur les téléphones en mode « pair-à-pair » en cas de coupure électrique. Ces innovations permettront de garantir l’acheminement instantané de l’alerte, même en situation dégradée (figure 1).

Figure 1. Preuve conceptuelle en l’état actuel du projet (J. Douvinet et G. Martin, 2019).

L’ensemble des compétences et des connaissances capitalisées par le consortium permettra la montée en charge rapide du démonstrateur, pour atteindre un niveau de maturité de 6 à la fin du projet (reporté à décembre 2021 à cause du COVID-19). La scénarisation et la réalisation d’exercices en conditions réelles avec divers publics, en lien avec des exercices cadre déjà organisés et d’autres exercices prévus par les autorités en 2021, constitue une prise de risque assumée : conformément à la réglementation, ces mises en situation sont délicates pour des raisons éthiques, déontologiques et juridiques. Mais une mise en sécurité rapide et appropriée concerne tout le monde. La pluralité des sites d’expérimentations permettra par ailleurs de valider la solution dans des configurations proches de celles attendues pour les J0 (2 sites privés fermés et 1 site public ouvert), avec des populations multiculturelles, et de garantir l’industrialisation du produit, qui vient répondre à la pluralité des usages et des besoins attendus pour les JO 2024, voire même au-delà.

Ce projet se veut donc ambitieux, au regard de plusieurs verrous :

  • techniques : comment harmoniser la diffusion des messages dans le Protocole d’Alerte Commun, quels que soient les capacités réseaux d’ondes exploitées, les sites, les événements ou les supports,
  • scientifiques : comment accroître les capacités d’action individuelles et escompter une prise de décision rapide, et comment impliquer le public dans des situations d’urgence simulées réelles ?
  • opérationnels : comment réduire le délai nécessaire à l’activation de l’alerte et garantir l’alerte depuis une plateforme numérique, y compris en mode dégradé ?

Il vient également répondre à une demande sociétale : l’alerte est une priorité nationale face aux événements d’ampleur à venir, tels que la Coupe du Monde de Rugby en 2023 ou les Jeux Olympiques et paralympiques de 2024.


1 Lutoff C., Creutin J.D., Ruin I., Borga M. (2016). Anticipating flash-flood: multi-scale aspects of the social response. Journal of Hydrology, 541, 535-626.

2 Weiss K.,Girandola F., Colbeau-Justin L. (2011). Les comportements de protection face au risque naturel : de la résistance à l’engagement. Pratiques sociales et environnementale, Edition in Press, 114p.

3 Lagadec P. (2015). Le continent des imprévus. Journal de bord des temps chaotiques. Paris, France, les Belles Lettres, 254p.

4 Créton-Cazanave, L. (2010). Penser l’alerte par les distances. Entre planification et émancipation, l’exemple du processus d’alerte aux crues rapides sur le bassin versant du Vidourle. Thèse soutenue à l’Université Joseph-Fourier – Grenoble I.

5 Douvinet J.(2018). Alerter la population face aux crues rapides en France : compréhension et évaluation d’un processus en mutation. Habilitation à Diriger des Recherches (HDR). Université d’Avignon.